Une saga alsacienne

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Dans le cadre d’une série de commentaires que je souhaite faire de romans policiers historiques, je voudrais débuter par une trilogie écrite par Emmanuel Viau et publiée récemment (2017-2019) aux Éditions du Signe. Ces trois ouvrages ne sont pas à proprement parler des polars ; on devrait plutôt les qualifier de romans noirs. Ils n’en restent pas moins fascinants, ne serait-ce que du point de vue historique. L’auteur y aborde l’Alsace sous un angle nouveau, du moins pour ceux et celles qui ne sont pas familiers avec le passé très riche de cette région de l’Europe qui fut de tout temps un lieu de passage des empires, des royaumes et des États. 

Les trois livres abordent trois périodes différentes (quatre en fait) de l’histoire d’Alsace.

Dans Les légions furieuses (2017), on évoque la danse des fous qui se produisit pendant un laps de temps très court de la longue histoire de Strasbourg, en 1518. Durant quelques semaines, une épidémie de manie dansante jeta à la rue des milliers de malades. Il s’agit de la fameuse « danse de Saint-Guy » restée célèbre sous ce nom dans la mémoire des hommes. La furie se termina abruptement sans que personne, même aujourd’hui, n’ait été capable d’expliquer le phénomène. L’auteur met en scène des personnages tout en contraste dont certains seront récurrents dans les deux autres ouvrages. Les descriptions de Strasbourg et des environs sont hallucinantes de vérité. On croirait y être !

Le deuxième livre, Le sang des paysans (2018), porte sur le massacre de l’armée des paysans en face de la ville de Saverne en 1525. Des milliers d’hommes furent tués en une seule journée. On retrouve l’un des personnages, Vit, enfant dans le premier livre, qui a pris la tête du soulèvement. Cette insurrection, l’une des premières grandes révoltes populaires de l’Europe moderne, fut réprimée dans le sang par une caste aristocratique impitoyable. Évidemment, les choses tournèrent mal et plusieurs mourront dans la tourmente. Mais à la toute fin du roman, la musique jouée par une mystérieuse flûte nous permet de garder espoir.

Le troisième livre se passe sur deux périodes différentes. Nous sommes toujours sur la lancée du livre précédent lorsqu’arrive le grand incendie du monastère du Mont Saint-Odile en 1546 pendant lequel nous suivons les traces de Marie, La petite muette du Mont Saint-Odile (2019). En parallèle, l’auteur nous accompagne dans un des événements les plus noirs de l’histoire de Strasbourg, à savoir le massacre de la Saint Valentin deux siècles auparavant, soit en 1349. Ce jour-là, la communauté juive de la ville a presque été éradiquée. Si, d’un premier abord, il n’est pas évident d’apercevoir le lien entre ces deux événements, la conclusion se chargera de nous le montrer, ce qui aura l’heur de surprendre le lecteur à de nombreux égards. Cette conclusion peut d’ailleurs être considérée comme une sorte d’épilogue à l’ensemble de la trilogie. 

La trilogie d’Emmanuel Viau est une véritable saga alsacienne. L’auteur a fait montre d’une grande exactitude historique, du moins selon certains fins connaisseurs du pays. Mais il y a beaucoup plus. Les trois livres nous tiennent en haleine tout du long par des intrigues particulièrement bien ficelées. Les personnages (les bons comme les méchants) sont parfaitement crédibles malgré la distance historique. De plus, les protagonistes sont particulièrement attachants, ce qui nous fait même regretter parfois de les perdre en route. Le rythme des ouvrages est haletant, à tel point que nous regrettons souvent de devoir interrompre la lecture. 

Ne boudez pas votre plaisir et dépêchez-vous de vous procurer cette magnifique saga alsacienne. Les trois volumes sont disponibles dans toutes les bonnes librairies françaises. Quelques exemples : FNACAmazon.fr. On peut également se les procurer au Canada chez Amazon.ca.

Marcel Viau